EDITO

Crypto : le rôle indispensable des notaires

S'il semble, de prime abord, un peu contre-intuitif de parler de l'utilité des notaires s'agissant des cryptoactifs, leur rôle est pourtant crucial tant ils peuvent apporter, pour l'investisseur, des réponses à des questions encore peu posées et néanmoins centrales.

🔵 Se tourner vers un notaire pour préparer sa succession semble naturel pour tout un chacun. Concernant les cryptos, plus que pour toute autre classe d'actifs, c'est indispensable. En effet, le notaire chargé du règlement successoral a difficilement accès à l'information concernant les avoirs en crypto-actifs de la personne décédée. Il n'y a, pour l'heure, aucune procédure permettant de récupérer l'information des exchanges centralisés ou des PSAN. D'ailleurs, les notaires peuvent avoir recours à des prestataires spécialement mandatés pour ce type de recherche. C'est souvent coûteux et le résultat n'est pas pour autant garanti. Pire encore, lorsque les avoirs sont conservés sur des portefeuilles auto-hébergés, en dehors du cercle du défunt, le notaire n'a virtuellement aucun moyen d'accéder à l'information et, moins encore, aux fonds correspondants à défaut de disposer des clés privées y donnant accès.

🔵 A ce stade, le problème est largement ignoré. Sans doute est-ce dû au fait que la plupart des détenteurs de cryptoactifs sont plutôt jeunes et se sentent forcément moins concernés par la problématique de leur succession. On peut cependant légitimement se demander pourquoi cette question est peu, voire pas, traitée alors même que près de 12% des français déclarent détenir des crypto-actifs. Et l'argument de la jeunesse présumée de ces détenteurs ne tient pas pour deux raisons. D'une part, être jeune ne signifie aucunement être à l'abri d'un accident. Et, d'autre part, le cercle des investisseurs crypto a largement débordé des cadres initiaux et l'âge moyen des détenteurs ne cesse d'augmenter. Il n'y a, de toute manière, pas d'âge pour rédiger un testament et il n'est jamais trop tard pour y adjoindre un codicille.

🔵 Enfin, le notaire a aussi un rôle de conseil. Il peut également être utile de faire appel à lui pour réfléchir à l'aspect fiscal de la succession. Pour ses cryptos, on peut envisager la donation, le mandat de protection future, le mandat à effet posthume ou le mandat de démembrement et sans doute d'autres montages en fonction des cas. D'ailleurs ce post s'adresse tout autant aux notaires eux mêmes qu'aux investisseurs : la crypto, c'est une classe d'actifs comme une autre, éligible à la plupart des dispositifs que vous connaissez déjà pour les pratiquer tous les jours. Le temps est sans doute venu de vous y mettre sinon par goût, du moins pour ne pas voir vos clients partir ailleurs. Et cette dernière remarque pourrait tout autant s'adresser aux conseillers en gestion de patrimoine. Mais c'est un autre débat.

Les cryptos sont devenus une classe d'actifs à part entière dont la succession s'organise au même titre que le reste du patrimoine. Faire appel à un notaire pour commencer à y réfléchir est donc non seulement possible mais indispensable. Ne pas le faire suffisamment tôt, c'est s'exposer au risque que vos héritiers n'en voient jamais la couleur par manque d'information ou que le fisc en soit, au final, le premier bénéficiaire.


Banque de France

Le gouverneur encourage l'émission de stablecoins euro

De quoi s'agit-il ?

Lors de l’ouverture du Forum Fintech à Paris, François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, a explicitement appelé les banques européennes à émettre des stablecoins libellés en euros et a salué l’émergence d’initiatives européennes, évoquant un premier consortium dont nous avons parlé dans une précédente édition.


Pourquoi c'est important ?

Ce message est destiné à encourager les banques françaises à suivre l'exemple de la Société Générale, précurseur avec le lancement de l'EURCV désormais disponible en Finance Décentralisée sur Morpho. Selon lui, la coexistence des dépôts tokenisés et des stablecoins en euros émis par les banques réglementées est essentielle à la future architecture monétaire de l’Europe.


Et la Banque Centrale Européenne ?

Emettons le vœu que cette prise de position publique amène la BCE à revoir son orientation car si la Banque de France reste loin en avance en matière d’innovation, de tokenisation et de souveraineté numérique en Europe, rien de pourra se faire sans un cadre règlementé européen suffisamment incitatif pour les banques. L'enjeu est de taille : il s'agit de la préservation de notre souveraineté monétaire face à l'écrasante domination des stablecoins dollar.


Stablecoins :

Bientôt dans les réserves fractionnaires ?

De quoi s'agit-il ?

Selon Blockstories, Paris Europlace prévoit d’examiner comment les réserves de stablecoins peuvent être intégrées dans le système de réserves fractionnaires, permettant ainsi à une partie de ces réserves d’être prêtée comme des dépôts traditionnels.


Pourquoi c'est important ?

Paris Europlace est le premier lobby financier français, représentant plus de 600 membres, dont BNP Paribas, Crédit Agricole et Société Générale. Ses documents d’orientation préfigurent souvent la position de la France dans les débats réglementaires européens.


N'est-ce qu'un premier pas ?

L’une des pistes explorées par Paris Europlace est de préciser les conditions dans lesquelles les établissements de crédit pourraient être autorisés à émettre des stablecoins, potentiellement adossés en partie au système bancaire à réserves fractionnaires. Si certaines banques hésitent encore à émettre des stablecoins, c'est parce que cela pourrait les forcer à adopter un régime de réserve complète, où chaque jeton doit être soutenu 1:1 par des actifs liquides.


Amundi :

Lancement imminent d'un ETP Bitcoin

De quoi s’agit-il ?

Amundi, le leader européen de la gestion d’actifs lancera en début 2026 ses propres ETP Bitcoin. La conservation pourrait être confiée à Caceis, l’une des filiales du Crédit Agricole, qui est l’actionnaire principal d’Amundi. Pour rappel, Caceis a obtenu l’agrément PSCA pour plusieurs activités et notamment la conservation d’actifs numériques.


Pourquoi c'est important ?

L’arrivée d’Amundi, qui gère plus de 2000 milliards d’euros d’actifs, est un nouveau signe que les acteurs de la finance traditionnelle accélèrent sur Bitcoin et les actifs numériques. Cette initiative intervient alors que Bitcoin connaît une demande sans précédent que ne reflète pour le moment que très partiellement son cours.


Amundi devra faire sa place, même en Europe

L'arrivée d'un acteur de cette importance sur le marché européen n'implique pas forcément un scénario à la BlackRock (qui truste désormais près de 60% des parts de marché aux Etats Unis). D'autres acteurs sont, en effet, déjà implantés depuis de nombreuses années sur ce marché (Bitwise, 21Shares, CoinShares, ...). On peut en revanche imaginer que les assureurs vont enfin suivre en acceptant rapidement d'intégrer le futur ETP dans leurs UC d'assurance vie.


Marché Crypto

Le week-end noir

Que s'est-il passé ?

En à peine une journée, le marché crypto a subi un choc d'une rare violence. Plus de 19 milliards de dollars de positions ont été liquidées, Bitcoin a chuté de 15 % en moins de 30 minutes. Certaines plateformes sont particulièrement montrées du doigt pour avoir encouragé le levier, un outil qui a contribué à amplifier les mouvements de prix via des liquidations en cascade.


Quelles sont les causes ?

Tout commence avec un tweet de Donald Trump jeudi dernier annonçant l’imposition de droits de douane de 100 % sur les importations chinoises, en réponse à la décision de Pékin d'appliquer de nouvelles restrictions sur l’exportation de terres rares. L’onde de choc a été immédiate et d’une ampleur inédite. L’open interest global (le montant total des positions ouvertes sur les produits dérivés) a été divisé par deux en quelques heures.


Les gagnants et les perdants

Ce stress test grandeur nature a été l'occasion de mettre à jour, une fois de plus, les vulnérabilités des exchanges centralisés. Binance, OKX, Bybit et bien d’autres n'étaient plus accessibles aux traders au moment le plus critique. Nombre d'entre eux se sont fait liquidés faute d'avoir pu passer leurs ordres à temps. Le grand gagnant est, sans conteste, la Finance Décentralisée et plus particulièrement les protocoles de lending. Le protocole Aave, pour ne citer que le principal, n'a ainsi pas été affecté : 180 millions de dollars de collatéraux ont été liquidés automatiquement en une heure, sans aucune dette résiduelle et ce malgré les mouvements de prix les plus violents jamais enregistrés sur ce marché depuis sa création il y a plus de 15 ans.


Stablecoins

Santander prend la tête d'un méga consortium

De quoi s’agit-il ?

Dix des plus grands établissements mondiaux (outre Santander qui en est l'initiateur, on retrouve notamment Bank of America, Goldman Sachs, Deutsche Bank, BNP Paribas, et UBS) annoncent la création d’un consortium destiné à explorer l’émission de stablecoins adossés aux principales devises du G7, notamment le dollar et l’euro.


L'Europe fait cavalier seul

A l'exception de BNP et Deutsche Bank, les banques européennes font le choix de rester en dehors, misant plutôt sur leur propre consortium créé il y a peu et dont nous avons parlé la semaine dernière. L'initiative européenne vise, en effet, à promouvoir exclusivement un stablecoin libellé en euro pour contester la domination outrageuse du dollar américain sur ce marché. La Société Générale quant à elle priorise, pour l'heure, le développement de son stablecoin EURCV.


L'attentisme prudent des banques centrales

Les banques centrales observent avec vigilance ces initiatives mais sans interventionnisme, du moins à ce stade : on reste dans du pur déclaratif du côté de la BCE ou de la banque d'Angleterre au travers de simples mises en garde rappelant que les stablecoins privés pouvaient représenter un risque pour la politique monétaire et la stabilité financière de la zone euro.