Dans l'édition du Monde du 14 octobre, un article sur le projet d'euro numérique de détail jette une pierre de plus dans le jardin de la BCE dont le projet d'euro numérique de détail semble ni adaptée au besoin des particuliers, ni susceptible de renforcer les banques commerciales confrontées à la menace que représente pour elles la montée en puissance des stablecoins libellés en dollar américain.


🔵 La fronde des banques sort des coursives pour s'étaler au grand jour. Alors même que de premières initiatives émergent au niveau européen pour l'émission concertée entre groupes bancaires de stablecoins libellés en euro (voir nos précédentes éditions), leur scepticisme quant au projet de la BCE de distribuer à horizon 2028 un euro numérique de détail (pour les particuliers) ne faiblit pas, loin s'en faut.


🔵 Indépendamment du coût du projet estimé par PWC entre 18 et 30 milliards d'euros, elles en contestent l'utilité pour les consommateurs qui sont les grands absents du débat. Elles soulignent surtout la menace que cet euro numérique ferait peser sur leur modèle économique. En effet, un euro numérique utilisable par les particuliers serait directement émis et distribué par la BCE au détriment de la monnaie commerciale qu'elles émettent par l'intermédiaire des crédits accordés à leurs clients. Elles craignent, de ce fait, un exode massif des dépôts bancaires sans lesquels leur rentabilité est menacée.


🔵 Et pendant ce temps, les Etats Unis qui ont annoncé, il y a maintenant près d'un an, renoncer à leur projet de MNBC font tout pour conforter leur domination totale sur les stablecoins émis à plus de 99% en dollar américain. Leur intérêt est évident : les émetteurs de stablecoins collatéralisent leurs émissions en achetant massivement de la dette américaine. L'occasion est trop belle de trouver nouveau preneur pour cet instrument de financement de leur train de vie dispendieux quand les acteurs traditionnels s'en détournent progressivement.


Peut-être le moment est-il venu pour la BCE de retrouver raison et de méditer sur la récente prise de position de la Banque de France qui, par l'entremise de son gouverneur, a fait savoir qu'elle entendait favoriser l'émergence de leaders européens sur le marché des stablecoins. A trop vouloir guérir le malade en le saignant, c'est parfois le traitement qui peut le faire mourir. Relire Molière pourrait peut-être vous être utile Mme Lagarde.